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ture / Arnold Djoud

L'invitation au voyage

Au fil de la conversation, on reviendra
sur cette carrière qui semble à peine
prendre le temps de souffler entre
deux succès. Il en parle à mi-voix,
avec la modestie qui est la marque
des vrais. Pas d'auto-célébration, juste
quelques repères, comme ces débuts solos
de 1993, avec la sortie de « Ntcho » et
de son titre phare « Tendresse ». Ou
encore la sortie en 1999 du single
« Elone 2000 ». Le coup de projecteur
est énorme et le pays tout entier vibre
au son du morceau. Dernières contri-
butions en date, le « 7ème ciel »
(2010) la « Standing ovation mbe
mbe » (2013) qui assoient un peu plus
la réputation de l'artiste.

Rien n'est jamais figé dans les albums d'Arnold Djoud. Avec ce Son nomadisme mélodique
5ème opus, il pousse un peu plus loin encore ce goût du voyage. On attendait donc avec impatience, la
Des mélodies et des textes, charpente idéale, et un succès de plus sortie de ce dernier opus. L'artiste
pour ce croqueur de charts. prend son temps entre deux albums.
En général deux ans, ce qui permet de
Joe-Malph Divassa Le chanteur met l'amour de son travailler les textes et les mélodies.
prochain et le rapprochement pour Pas de précipitation, du boulot bien
P as de trucage, le refus des for- valeurs premières. Les gens ont fait. « Eklektik » est à cette image.
mules toutes faites, Arnold met apprécié le côté festif, avec des Sinon, il s'inscrit un peu plus encore
dans la discussion les mêmes morceaux comme « Juste un petit wé » dans la diversité musicale.
qualités que sur scène : le coeur. Si ce ou « Tché tché koulé », mais ils Arnold aime passer d'un style à l'autre,
dernier album multiplie les tubes, ce raffolent aussi les thèmes de société, c'est son nomadisme mélodique, son
serait une erreur de le limiter à ce quand l'artiste aborde le mariage, le « invitation au voyage ». Sonorités
constat. Oui, Eklektik truste les pistes rapport cannibale à l'argent, l'hypocrisie elone, empire, voisinent avec les
de danse, les maquis comme les céré- et la médisance. L'artiste en a person- tempo de rumba et de salsa, caraïbes
monies de mariage. La raison ? nellement souffert. Pas de trémolos bien tempérés, et pour la touche
Certainement la sonorité, mais aussi dans la voix, juste ce constat. Ce d'épice, des rythmiques afro-pop et
le propos, une franchise et un esprit poison perfuse. Il pourrit les rapports ntcham. L'autre singularité réside dans
positif. humains. les paroles qui privilégient les langues
locales. Aucun doute que le succès
tient aussi à cette inscription culturelle.
« Je voulais que l'on sente les racines
gabonaises. Je crois dans cette proxi-
mité ». Un cinquième album donc,
plein de maturité, rythmé à la perfection
et qui choisit bien ses mots. Il n'en
fallait pas plus.

Allez, on attend deux ans encore et
Arnold reviendra avec dans ses guitares
et ses percussions, d'autres rivages.
Un voyageur musical, les soutes
remplies de mélodies. I

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