Entre la perpétuité requise par le parquet général et l'acquittement sollicité par son conseil, la Cour a coupé la poire en deux.
Pour le ministère public, les éléments constitutifs des infractions mises à sa charge – à savoir, association de malfaiteurs, diffusion de nouvelles fausses ayant troublé l'ordre public, incitation à la révolte contre l'autorité de l'État et trouble à la paix publique – sont clairement constitués. Et la Cour n'avait qu'à appliquer la loi dans toute sa rigueur.
Requérant contre l'accusé Roland Désiré Aba'a Minko la peine maximale, soit la réclusion criminelle à perpétuité, tel que prévu par l'article 68 du Code pénal, le ministère public a étayé ses réquisitions par la gravité des faits, l'accusé ayant déclaré avoir miné les bâtiments publics à Libreville, ajoutant qu'il pouvait les faire sauter si Ali Bongo Ondimba ne démissionnait pas. Et que par la suite, il a, à l'aide des CD conçus, tenté de faire passer dans les médias audiovisuels (radio et télé) "un message révolutionnaire". Le colis porté aux organes de presse n'avait-il pas la mention "La Révolution du peuple" ?
Le procureur général, ne voulant pas se départir de la volonté de rigueur dans la sanction, a invité la Cour à n'accorder à l'accusé aucune circonstance atténuante, affirmant qu' "il y a bien eu intention coupable de déstabiliser les institutions de la République", non sans indiquer qu' "en Afrique, lorsqu'un enfant joue avec le feu, qu'il continue à jouer avec le feu…"
Sur les accusés Obame Nguema et Oubala Boussougou en revanche, le maître des poursuites a requis l'acquittement.
Les conseils des accusés Aba'a Minko, Gnama Lembambi, Rembogo Serge, Oubala Boussougou et Obame Nguema ont sans doute exploité les insuffisances juridiques des enquêtes et du réquisitoire du ministère public. Défendant les accusés Gnama Lembambi (cas nécessitant une surveillance psychologique, voire psychiatrique) et Rembogo Serge (plus aveugle que clairvoyant) poursuivis pour l'infraction d'association de malfaiteurs, Me Pie Makanga s'est demandé comment "on a pu rendre leurs dépositions crédibles ?" Et en raison de leur longue détention de 13 mois, ils souffrent de stigmates, "et les garder en prison serait un supplice".
Après délibération, la Cour a condamné Roland Désiré Aba'a Minko à 10 ans de réclusion criminelle dont 5 avec sursis et une amende de 5 millions de francs. Oubala Boussougou et Obame Nguema ont été acquittés. Gnama Lembambi et Rembogo Serge ont été déclarés coupables du délit d'association de malfaiteurs, mais laissés en liberté. Otandault Rogauzas Franck Doris et Nang Engo Arlain, jugés par contumace, ont écopé de la même peine.
E. NDONG-ASSEKO
Retrouvez l'intégralité de cet article dans la version numérique complète
Retournez à la rubrique Justice & Faits divers au Gabon